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Communion tropicale

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Message  tropifan Jeu 5 Juil 2012 - 22:03

COMMUNION TROPICALE




A cette époque je vivais et travaillais depuis un an à Quito, capitale de l´Equateur, et j´avais très envie de visiter et de connaître ce pays en profondeur. Je sautai donc sur l´occasion lorsqu´une collègue me demanda de l´accompagner dans un village indien perdu dans les Andes, car elle n´avait pas de voiture et mon Trooper Chevrolet avec ses quatre roues motrices nous permettrait de vaincre les obstacles du chemin.

Cette femme s´intéressait à la peinture, et elle avait fait la connaissance d´un peintre "naïf" indigène qui venait de temps à autre à Quito vendre à un prix ridiculement bas ses tableaux, des scènes de la vie andine sur peau de mouton. Je suppose qu´elle envisageait de lui acheter sa production pour la revendre beaucoup plus cher à des touristes étrangers.

Quant à moi, je me réjouissais de cette occasion de pénétrer dans un village indien, ce que je n´aurais pu faire seul car ces communautés montagnardes sont assez fermées.




Après plus de trois heures de voyage relativement tranquilles grâce à mon Trooper, nous arrivâmes dans ce petit coin des Andes qui n´avait probablement que très peu changé depuis des siècles. Pas d´électricité, pas d´eau potable, maisons aux murs de torchis et au toit de chaume, têtes couvertes de chapeaux, ponchos rouges, enfants dépenaillés gardant quelques moutons et lamas, tout cela dans un cadre grandiose. Je me sentais bien loin de Quito.

Ce peintre-agriculteur nommé Luis nous présenta sa femme et ses sept enfants âgés de 11 ans à quelques mois. Tous, enfants et parents, étaient intimidés devant nous, n´ayant jamais eu l´occasion de recevoir des gens de la ville, et un étranger qui plus est, mais je fis tout mon possible pour les mettre à l´aise en bavardant avec Luis et Raúl, l´aîné des enfants, alors âgé de 11 ans et demi, qui était en dernière année de primaire.

Il était lui aussi intimidé et son espagnol n´était pas excellent (les Indiens des Andes parlent le quichua, la langue des anciens Incas), mais je me rendis compte que ce garçon était plus intelligent que la moyenne et surtout qu´il était animé d´une farouche volonté d´étudier. Cela, il le devait à son père qui avait compris que l´instruction est la clé permettant d´accéder à un meilleur niveau de vie.




Nous étions sur le point de repartir lorsque Luis me demanda d´être le parrain de Raúl. On peut être parrain de baptême, de confirmation, de mariage, mais dans ce cas il s´agissait de la première communion. Je n´étais pas dupe, il pensait que j´étais riche, instruit, influent, j´étais donc le parrain idéal pour aider son fils à "réussir".

Je n´ai pas hésité car l´idée de permettre à un jeune indigène de bousculer les barrières sociales et les préjugés racistes me plaisait beaucoup, et j´ai donc accepté.






Un mois plus tard, je suis retourné dans ce village, invité par mon futur compère*. C´était un dimanche et lorsque je suis arrivé, il était devant la petite chapelle avec quelques autres villageois. Il m´a présenté au jeune curé italien qui venait deux fois par mois dire la messe, et il lui a expliqué que Raúl désirait faire sa première communion pour que je devienne son parrain.

C´est alors qu´a eu lieu un épisode comique dont je rigole encore, tant d´années après. Le petit curé a déclaré d´un ton solennel, mélangeant espagnol et quichua : "Pour faire la première communion, il faut étudier le catéchisme. Taita obispo (Papa évêque) dit un an de catéchisme, moi je dis six mois".




Ça me faisait penser à une vente aux enchères, j´avais envie de crier :"Et moi je dis deux mois ! Qui dit mieux ?"

Six mois, c´était encore beaucoup trop pour Luis, il devait avoir peur que je change d´avis, et donc le plus tôt serait le mieux. Il est venu me trouver :

- Si c´est comme ça, on va aller avec les protestants.

J´ai eu du mal à réprimer un fou rire.

-Mais les protestants, ils ne font pas de première communion, ni de deuxième. Pas de communion avec eux !




Il n´avait pas prévu ça le pauvre Luis. Le voyant très embarrassé, j´ai essayé de débloquer la situation. J´ai pris le jeune curé à part :

- Le catéchisme, c´est pas mon rayon, c´est le vôtre. Mais ce que je peux vous dire, c´est que si vous ne vous montrez pas un peu plus souple, vous risquez de perdre des clients.

- Vous voulez dire que...

- Qu´ils risquent de passer à la concurrence.

- A cette secte protestante ?

- Oui, c´est ce que j´ai entendu.




Le risque de perdre ces âmes devait tourmenter ce pauvre curé. Si bien que finalement il fut convenu qu´un vieil Indien qui avait quelques notions de catéchisme préparerait les candidats , et que la première communion aurait lieu trois mois plus tard. Luis était satisfait... et moi j´avais bien rigolé et j´étais content de moi.




* compère, commère : en français ces mots ont perdu leur sens premier et sont péjoratifs. En espagnol d´Amérique (compadre, comadre) ils ont conservé leur sens premier (père avec, mère avec). Accepter d´être parrain d´un enfant, c´est un lien très fort qui se crée avec les parents de cet enfant, presque comme un lien familial.


LA SUITE DANS QUELQUES JOURS SI VOUS LE DÉSIREZ

Traversée à gué avec le Trooper

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Message  KTsering Jeu 5 Juil 2012 - 22:20

Oh oui, on veut !

Vivement la suite Very Happy

Et merci beaucoup de partager avec nous de tels souvenirs.

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Message  tropifan Jeu 5 Juil 2012 - 22:32

Une autre photo prise le même jour. De gauche à droite : mon futur compère Luis, la grand-mère, la mère avec la petite dernière, et Raúl

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Message  KTsering Jeu 5 Juil 2012 - 22:36

Et un petit frère à l'arrière, avec le pull rouge ?

Raul fait plus que 11 ans, je trouve. Déjà très mûr.

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Message  tropifan Jeu 5 Juil 2012 - 23:03

KTsering a écrit:Et un petit frère à l'arrière, avec le pull rouge ?

Oui, c´est l´un des frères, il y a 4 garçons et 3 filles. Quant à Raúl, il avait presque 12 ans (en Amérique Latine, pas de "et demi", on a 11 ans jusqu´au jour de son 12ème anniversaire)


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Message  Simulacra Ven 6 Juil 2012 - 7:02

1) Histoire vraiment très intéressante. Merci de la partager avec nous ! Et franchement, si tu veux nous faire un cahier de souvenir de toutes tes années passées là-bas, si tu racontes aussi bien avec un style aussi propre, je signe tout de suite pour 10 ans

2) Le truc qui me fait le plus plaisir, c'est qu'on a le droit à des images \o/ (tropifan comprendra très bien ma joie Very Happy)

3) Ah ah ah, c'est fort ça, négocier avec le curé pour pas que le gamin passe à la concurrence Very Happy

4)
Nous étions sur le point de repartir lorsque Luis me demanda d´être le parrain de Raúl. On peut être parrain de baptême, de confirmation, de mariage, mais dans ce cas il s´agissait de la première communion. Je n´étais pas dupe, il pensait que j´étais riche, instruit, influent, j´étais donc le parrain idéal pour aider son fils à "réussir".

Je n´ai pas hésité car l´idée de permettre à un jeune indigène de bousculer les barrières sociales et les préjugés racistes me plaisait beaucoup, et j´ai donc accepté.

J'adore le principe "il pensait que j'avais des thunes et voulait se servir de moi. J'ai tout de suite dit oui, j'aime qu'on se serve de moi"

Cet enfant, c'est le combientième de tes filleuls ? Very Happy Tu es encore en contact avec lui ?
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Message  tropifan Ven 6 Juil 2012 - 8:11

Simulacra a écrit:Cet enfant, c'est le combientième de tes filleuls ? Very Happy Tu es encore en contact avec lui ?

Difficile à dire, quand on aime on ne compte pas, c´est bien connu Laughing Il a beaucoup grandi, il est même devenu célèbre... mais je raconterai ça dans le prochain épisode. Et bien sûr nous sommes toujours en contact.

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Message  tropifan Dim 8 Juil 2012 - 15:23

COMMUNION TROPICALE (LA SUITE)




Trois mois plus tard, comme convenu, je suis retourné dans le village de mon filleul, accompagné d´une amie équatorienne. La petite chapelle était bondée, mais on nous avait réservé deux places au premier rang en tant qu´invités d´honneur. Messe assez courte car le jeune curé devait encore en dire une autre dans une communauté distante de plusieurs kilomètres, et cérémonie extrêmement simple : pas de vêtement spécial pour cette occasion, mais les communiants portaient un petit bouquet de fleurs des champs blanches, symbole de pureté.

Après la messe, nous étions invités à déjeuner chez mon compère, à un ou deux kilomètres de l´église, et mon Trooper ayant cinq places, j´avais prévu ingénument de transporter Raúl et ses parents. Preuve que je ne connaissais pas les coutumes locales !

En effet, à peine Luis et Raúl installés, ce pauvre Trooper a été pris d´assaut par toute une bande joyeuse d´hommes et d´enfants qui voulaient profiter du "taxi". Il y en avait partout, les uns sur les autres à l´arrière et à l´avant, mon amie ayant un gamin sur chaque genou et un voisin qui la pressait contre moi, mais aussi dans le compartiment à bagages et sur les marchepieds. Je n´ai pas fait le compte mais je suis sûr que nous étions une vingtaine, entre adultes et enfants, dans ce malheureux véhicule. Tous de sexe masculin, à part mon amie bien sûr.

"Et les femmes ?" me direz-vous. Eh bien les femmes et les fillettes trottinaient derrière nous. Amis lecteurs, soyez gentils, ne me dénoncez pas au MLF, je me ferais insulter. Ce qui serait injuste car je n´y pouvais rien, les envahisseurs ne m´ayant pas demandé mon avis. Mon amie équatorienne, connaissant mieux que moi les us et coutumes de la région, n´était pas spécialement choquée, mais au retour, alors que nous commentions cette journée, elle m´a tout de même dit : "Il y a du travail avant qu´on parvienne à l´égalité des sexes dans ce pays !"

Ce que je regrette, c´est de n´avoir pas de photo de ce moment inoubliable, ce serait un superbe souvenir... et elle aurait pu servir de publicité à Chevrolet pour vanter la robustesse de son modèle.




Luis avait tué un mouton pour l´occasion car il fallait nourrir une trentaine de personnes. Mais oubliez le méchoui ou le gigot, la viande avait été bouillie (un gastronome ne trouverait pas son compte dans une fête indienne). Il faut comprendre que ces gens sont très pauvres, que souvent ils ne mangent pas à leur faim, alors pour eux un bon repas c´est lorsqu´on peut se remplir l´estomac et manger de la viande, ce qu´on ne se permet que rarement car c´est cher. Rien de plus.

Et personne n´allait sortir de table (façon de parler, nous étions assis sur des pierres) le ventre vide car des oeufs durs et des pommes de terre bouillies complétaient le menu. Pour arroser tout cela, de l´eau et un verre de coca.

"Fromage ? Dessert ? " me direz-vous. Décidément vous êtes d´incorrigibles franchouillards ! Ce n´était pas un trois étoiles, je vous l´ai dit, et puis si vous vous étiez goinfré de viande de mouton et de pommes de terre bouillies, vous les mettriez où le fromage et le dessert ?




Par contre il y avait quelque chose que les adultes (hommes surtout) attendaient et qu´on ne vous servira pas gratis dans un trois étoiles : de la gnôle à gogo. En effet mon compère avait eu la bonne idée d´inviter quelques musiciens, indigènes également, dont le répertoire était exclusivement composé de sanjuanitos, sortes de paso-dobles ou de marches. Dès qu´ils ont commencé à jouer, les bouteilles ont circulé. Chaque danseur buvait une bonne gorgée au goulot puis passait cet alcool de canne à sucre à son voisin. Et impossible pour un homme de refuser, ce qui aurait été considéré comme un grave manque de savoir-vivre, voire un affront.

Mais moi je devais conduire au moins trois heures, dont près d´une heure sur des pistes dangereuses pour rentrer à Quito. Pour ne vexer personne, j´ai donc utilisé un subterfuge qui m´a servi lors de toutes les fêtes indiennes auxquelles j´ai été invité par la suite : tout en continuant à danser, je portais le goulot à mes lèvres fermées, puis je passais la bouteille au suivant.

Au bout de 15 à 20 minutes j´étais le seul danseur encore sur pied, tous les autres étaient étendus sur le sol. J´en ai profité pour dire au revoir à ma commère, en lui demandant de remercier son mari qui n´était pas en état de prononcer un mot, et j´ai rassuré mon amie qui était pessimiste sur nos chances d´arriver entiers à Quito : "Ne t´inquiète pas, j´ai fait semblant de boire mais je n´ai pas avalé plus de trois ou quatre gouttes d´alcool".




Raúl m´attendait près de la voiture, un paquet enveloppé de papier journal sous le bras. Il me l´a tendu :

- Parrain, c´est pour vous.

Un magnifique tableau sur peau de mouton, comme ceux que vendait son père, mais plus beau. J´ai ainsi appris que lui aussi peignait pour arrondir le budget familial, et mieux que son père. On peut y voir tout ce qui fait la vie d´un petit paysan indien de la montagne : des moutons, des vaches, deux lamas en train de s´accoupler, des gens en poncho rouge et chapeau blanc, des maisons au toit de chaume, un volcan enneigé, un merveilleux soleil à visage humain, sans oublier un grand condor. Le tout en style "naïf" bien sûr.

J´étais terriblement ému, j´en avais les larmes aux yeux. Je n´ai trouvé à dire que :

- Merci beaucoup. Il est magnifique ce tableau, je le garderai toujours.




J´ai tenu parole, il m´a suivi partout. A l´heure où j´écris ces lignes, il est accroché au mur, juste au-dessus de l´ordinateur. Et même si on m´en proposait une grosse somme, je ne le vendrais pas.

C´était le début d´une improbable et profonde amitié entre un Européen et un jeune Indien équatorien.


Le tableau de Raúl

Communion tropicale Tablea10

Raúl, en pull blanc, est le seul sans chapeau. C´est le signe qu´il était prêt à ouvrir de nouveaux chemins pour les siens

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L´orchestre de la fête

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Raúl adolescent sur son lama

Communion tropicale 70395613

SUITE ET FIN PROCHAINEMENT : L´IRRÉSISTIBLE ASCENSION DE RAÚL


Dernière édition par tropifan le Mer 27 Fév 2013 - 13:29, édité 12 fois

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Message  Simulacra Dim 8 Juil 2012 - 16:34

Vraiment sympa cette petite histoire. Il est devenu un grand peintre ? Very Happy

Pour la technique du goulot, je la connaissais Very Happy (et pratique aussi de temps en temps Very Happy)
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Message  tropifan Dim 8 Juil 2012 - 17:15

Non, ce n´est pas dans la peinture qu´il s´est rendu célèbre. Il avait ce talent mais il ne considérait cet art que comme un artisanat qui lui procurait un peu d´argent pour acheter le nécessaire et aider ses frères plus jeunes. Réponse dans le 3ème et dernier épisode Very Happy

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Message  Malika2811 Dim 8 Juil 2012 - 17:23

Tel une fan j'attend la suite de ton histoire j'hésite un jour raconter une de mes nombreuses histoire mais j'hésite Very Happy sur ce cher Tropi je te connaisais pas ce talent tu écrits des chansons, des histoires, fait des tiercés, des quinté,... mais il y a-t-il une chose que tu ne sais pas faire cher ami ? Very Happy Razz
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Message  KTsering Dim 8 Juil 2012 - 17:32

Cher Tropifan, Tu nous tiens en haleine :-)

Un grand merci pour cette jolie histoire. Nous avons de la chance sur ce Forum, d'avoir de si belles plumes sunny

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Message  tropifan Dim 8 Juil 2012 - 17:52

Malika2811 a écrit:cher Tropi je te connaisais pas ce talent tu écrits des chansons, des histoires, fait des tiercés, des quinté,... mais il y a-t-il une chose que tu ne sais pas faire cher ami ? Very Happy Razz

Ou la la !!! Il y a tant de choses que je ne sais pas faire, à commencer par l´informatique : sans l´aide de Simu j´aurais été incapable d´illustrer cette histoire avec des photos. Tiens, une chose qui m´a manqué depuis toujours, je suis nul, archinul en dessin Sad

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Message  Malika2811 Dim 8 Juil 2012 - 18:17

tropifan a écrit:
Malika2811 a écrit:cher Tropi je te connaisais pas ce talent tu écrits des chansons, des histoires, fait des tiercés, des quinté,... mais il y a-t-il une chose que tu ne sais pas faire cher ami ? Very Happy Razz

Ou la la !!! Il y a tant de choses que je ne sais pas faire, à commencer par l´informatique : sans l´aide de Simu j´aurais été incapable d´illustrer cette histoire avec des photos. Tiens, une chose qui m´a manqué depuis toujours, je suis nul, archinul en dessin Sad


Ben moi le dessin c'est une des rares choses que je sais bien faire Razz
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Message  Simulacra Dim 8 Juil 2012 - 19:38

tropifan a écrit:Non, ce n´est pas dans la peinture qu´il s´est rendu célèbre. Il avait ce talent mais il ne considérait cet art que comme un artisanat qui lui procurait un peu d´argent pour acheter le nécessaire et aider ses frères plus jeunes. Réponse dans le 3ème et dernier épisode Very Happy

La musique ?
La politique ?
Le catéchisme ?
L'informatique ?
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Message  tropifan Dim 8 Juil 2012 - 20:01

Simulacra a écrit:La musique ?
La politique ?
Le catéchisme ?
L'informatique ?

Bien joué ! C´est l´une des quatre options... mais je n´en dirai pas plus jusqu´à la publication du dernier épisode Very Happy Very Happy Very Happy

Comme lot de consolation, tu as le droit de voir l´orchestre de la fête qui ferait pâlir d´envie les PCAIF Laughing


Dernière édition par tropifan le Lun 9 Juil 2012 - 20:17, édité 1 fois

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Message  tropifan Lun 9 Juil 2012 - 19:07

COMMUNION TROPICALE - - - LA FIN


A la rentrée scolaire suivante (début septembre comme chez nous), Raúl s´est inscrit au collège de Pujilí, la petite ville la plus proche, où son père lui avait loué un minuscule appartement. Comme il était le premier de sa communauté à fréquenter ce collège, il lui a fallu beaucoup de courage pour supporter les réflexions et vexations racistes de quelques imbéciles, mais au lieu de le décourager cette difficile situation l´a blindé.

Il a dû affronter un autre problème, la différence de niveau scolaire, car celui de son école de village était extrêmement bas, d´abord à cause de la langue, les enfants indiens ne commençant à parler espagnol qu´à leur entrée à l´école. Ajoutez à cela la mauvaise volonté des instituteurs métis qui considéraient cette nomination dans un village indien comme une punition et ne faisaient classe que trois jours sur cinq, le lundi étant consacré au voyage aller et le vendredi au retour.

Mais à force de travail et grâce à son intelligence, Raúl s´est mis au niveau et a même dépassé ses camarades de classe puisqu´à la fin des six années de secondaire il a été récompensé par le titre de meilleur élève du collège. Il avait d´autant plus de mérite que tous les soirs, en plus des leçons et devoirs, il peignait de petits tableaux que mon amie et moi vendions à nos amis et collègues, ce qui lui permettait de payer le loyer, les frais scolaires, l´habillement, la nourriture qu´il préparait lui-même, et d´aider son père à envoyer tous ses frères et soeurs à l´école.

Et lorsque ce marché a été saturé, j´ai commencé à envoyer ces tableaux à des amis de France qui les vendaient à un meilleur prix. Mais comme je le disais dans un commentaire, il n´a jamais considéré cette activité comme de l´art, seulement comme un artisanat qui lui permettait de poursuivre ses études.

Au cours de ces six années, j´étais souvent invité aux diverses fêtes du village, et pendant les vacances scolaires de Noël, de Pâques, d´été, Raúl venait passer quelques jours chez moi, ce qui lui permettait de s´habituer à la vie dans une grande ville et de découvrir des choses nouvelles pour lui comme la cuisine française et la musique. Il aimait beaucoup ces petits séjours qui étaient ses seules vraies vacances : plus de devoirs, plus de peinture, plus d´imbéciles racistes à supporter.

Le soir, nous avions de longues conversations sur tous les sujets, avec une préférence pour les problèmes de société et la politique, car sa vie à Pujilí, au milieu des métis, lui avait fait prendre conscience des injustices qui frappaient principalement les indigènes. Dès l´âge de 15 ans, il savait ce qu´il voulait faire dans la vie, défendre ses frères Indiens maltraités et méprisés, les faire respecter et améliorer leur niveau de vie. Il ne savait pas encore comment mais son but était clair.




Nouveau problème en entrant à l´université pour étudier le droit, son collège de province ayant un niveau plus bas que ceux de Quito. Je m´en suis rendu compte en l´inscrivant au British Council : après six ans d´anglais, le meilleur élève de Pujilí n´était pas capable de faire la moindre phrase et a été envoyé au niveau 1 avec les débutants... ce qui en dit long sur l´incompétence des profs de son collège. Mais comme lors de ses difficiles débuts au collège, il n´a pas tardé à se hisser au niveau de ses camarades de la faculté et à les dépasser puisqu´il a été l´un des rares de sa promotion à terminer ses études de droit sans jamais redoubler.

Il continuait à peindre le soir, ce qui lui assurait une indépendance financière, et pour ma part je payais le loyer du petit appart qu´il avait loué près de l´université, ce qui n´était pas un gros effort car la monnaie locale était au plus bas. Comme il devenait de plus en plus difficile pour mes amis de France de vendre ses tableaux, c´est Luis, son père, qui s´en occupait à temps plein en parcourant sans cesse les foires et les endroits touristiques pour proposer sa propre production et celle de Raúl.

Pendant ces années d´université, on se voyait assez souvent lui et moi, on se débrouillait pour dîner ensemble au moins deux ou trois fois par mois. Et un soir il m´a dit : "Dans ce pays il y a beaucoup trop d´enfants qui n´ont pas de père, alors que moi j´en ai deux, un père indien et un père blanc". Je crois qu´il le pensait vraiment, et j´ai été aussi fier qu´un véritable père quand il m´a invité à assister à la défense de sa thèse de doctorat sur le droit coutumier indigène en Equateur qui lui a valu les félicitations du jury.




C´est à cette époque qu´il s´est lancé dans l´action politique en militant au parti indigène Pachakutik qui était devenu une force avec laquelle il fallait compter, les Indiens ayant démontré qu´ils étaient capables de bloquer le pays en coupant les routes principales. Au cours d´une réunion dans sa province, il a fait la connaissance de celle qui allait devenir sa femme, et ce n´était pas n´importe qui ! En effet Lourdes, plus connue sous le diminutif de Lulu (prononcé loulou), était l´égérie des Indiens d´Equateur, une jeune femme très intelligente avec un culot monstre et un sens de la répartie foudroyant qui plaisait beaucoup aux journalistes... et beaucoup moins aux hommes politiques qu´elle combattait.

Il me l´a présentée alors que cette liaison n´était pas encore connue et j´ai tout de suite sympathisé avec elle. Par la suite j´ai eu sur elle une influence... non pas politique mais culinaire car dans ses rares heures libres elle aimait bien cuisiner, et c´est ainsi que le lapin en gibelote s´est répandu parmi les dirigeants indiens.

Simple militant lorsqu´il a connu Lulu, Raúl est devenu en quelques mois l´un des principaux dirigeants du mouvement Pachakutik et s´est retrouvé sous les projecteurs, plus comme mari de Lulu que comme homme politique il est vrai. Les naissances de leurs deux premiers enfants ont été des évènements nationaux avec reportages à la télé et sur les journaux.

Lors des élections suivantes, Raúl a été élu député et Lulu s´est retrouvée ministre chargée des affaires indigènes. Comme au collège, comme à l´université, mon cher Raúl s´est distingué au congrès par son assiduité et en faisant voter plusieurs lois rendant justice aux Indiens. Si bien que les journalistes politiques l´ont élu comme meilleur député du Congrès.

Et consécration au niveau international, il a reçu du gouvernement espagnol le Prix "Bartolomé de las Casas" qui récompense chaque année une personne ayant oeuvré pour améliorer la vie des indigènes d´Amérique. Prix de 50 000 euros remis par Don Felipe, le prince héritier d´Espagne, et accompagné d´un séjour de quatre mois tous frais payés dans une université de Madrid.




ÉPILOGUE : Raúl et Lulu ont un appartement à Quito, ils se sont fait construire une maison à Pujilí, ils se sont offert une magnifique voiture tout terrain, ils ont deux beaux enfants, Kaya et Ayán. La vie leur sourit.


ET TOUT ÇA À CAUSE D´UNE COMMUNION TROPICALE !!!



Raúl adolescent chez moi

Communion tropicale 72879610


Une photo de Raúl avec ses enfants que je viens de trouver sur google (elle doit dater de 4 ou 5 ans)

Communion tropicale Ilaqui10


Kaya et Ayán, les enfants de Raúl et Lulu (photo prise il y a 16 mois)

Communion tropicale Kaya_y10


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Message  Simulacra Lun 9 Juil 2012 - 19:20

Et bé, sacré belle histoire. Tu dois être fier de lui. Ton action à ses côtés est une belle démonstration d'ouverture et d'amitié.

Superbe histoire, vivement la prochaine Very Happy Je suppose que tu es toujours en contact avec lui ?
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Message  Malika2811 Lun 9 Juil 2012 - 19:27

Et bien tropi c'est une magnifique fin ! Tu en as de la chances d'être le parrain d'une personne si bien que Raùl ! Very Happy
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Message  tropifan Lun 9 Juil 2012 - 19:32

Simulacra a écrit:Je suppose que tu es toujours en contact avec lui ?

Il est très occupé mais on s´envoie des mails de temps à autre ou on se téléphone. J´ai beaucoup d´affection pour tous mes filleuls mais c´est celui dont je suis le plus fier.

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Message  Simulacra Lun 9 Juil 2012 - 19:37

Aaaaaaaaaaaaah je vais le dire aux autres, ils vont être jaloux Very Happy Very Happy Very Happy
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Message  KTsering Lun 9 Juil 2012 - 21:12

Cher Tropifan, que dire sinon : "Merci". De tout coeur.

Je suis pleine d'admiration pour le parrain, le filleul, la belle-filleule, sans oublier le compère.

Et cerise sur le gâteau, ils sont beaux comme tout.

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Message  Simulacra Mar 10 Juil 2012 - 7:58

Adulte, il a remis le chapeau qu'il avait enlevé enfant sur la photo ? Very Happy
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Message  tropifan Mar 10 Juil 2012 - 8:32

Les histoires de chapeau, c´est compliqué ! On en avait parlé lui et moi, je ne voulais pas l´influencer et je n´ai fait qu´approuver son choix : quand il se trouvait dans le monde métis à Pujilí ou Quito, pas de chapeau ni de poncho, mais il les remettait en arrivant dans son village, et ça a duré pendant toutes les années de collège et d´université.

C´est quand il a défendu sa thèse de doctorat qu´ il a décidé de s´assumer complètement comme Indien, il a donc remis chapeau et poncho au grand étonnement de ses copains de fac. Et dès qu´il a commencé à être connu en politique comme leader indigène, c´était une obligation... en public.

Parce que quand ils venaient chez moi à Guayaquil sur la Côte où j´habitais alors, lui et sa femme, c´était incognito, habillés comme tout le monde. Et je crois que ça continue parce que quand j´ai pris la photo des enfants il y a 16 mois dans un centre commercial, il était en blouson et casquette, comme les métis et comme moi.

Quant à cette photo que j´ai trouvée sur google, elle a été prise chez ses parents dans le village


Dernière édition par tropifan le Mer 12 Sep 2012 - 20:23, édité 2 fois

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Message  Simulacra Mar 10 Juil 2012 - 10:30

Le chapeau et le poncho, à part que ce sont des habits traditionnels, ça a une certaine valeur ? C'est une obligation dans ces peuplades ?
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